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bidon blog
16 mai 2006

Perdu

Ce matin-là quand elle ouvrit l’œil, tout avait changé dans sa chambre : la couleur de papier de mur n’était plus blanche, les meubles n’étaient pas non plus les siens, le réveil qu’elle avait éteint chaque matin, au moins mille fois, n’était plus le même. Une seule chose n’avait pas changé, c’était elle-même dans son pyjama d’été. Fabienne se leva doucement et chercha ses chaussons mais comme tous les autres objets, ils n’étaient plus là où il fallait. Elle descendit du lit et se mit debout. Lorsqu’elle sentit le sol, froid et dur sous ses pieds, elle réalisa que ce n’était pas un rêve. Elle ouvrit la porte. Ce qu’elle vit, ce n’était non plus son salon. Restée quelques instants sans savoir quoi faire, elle se dirigea enfin vers le téléphone. Elle ouvrit le carnet de téléphone, ne reconnût aucun nom de ses proche. Elle vit quelques courriers ouverts sur la table basse. Elle hésita mais finit par vérifier le nom sur le courrier. Mme et M. XXX. Ce n’était pas son nom. D’un coup, elle entendit la clé qui rentra dans la serrure tourna deux fois. La porte s’ouvrit sans hésitation et elle vit devant elle une dame tenant un sac de marché dans une main, des courriers dans l’autre.

C’était ce dont elle se rappelait. Elle était amenée, suite à l'appel de Mme XX, au bureau de police. On ne trouvait aucun papier d’elle. On ne savait pas non plus comment elle avait pu rentrer chez Mme et M. XX alors que ça durait seulement une heure, pour l’absence de Mme XX de ses courses. On ne comprenait surtout pas l’attitude de Fabienne qui n’arrêtait pas de dire qu’elle était chez elle où elle habitait, selon elle, depuis quatre ans. On essaya de téléphoner sur les numéros que Fabienne avait donnés au policier comme ceux de ses proches. Mais parmi ceux qui avaient répondu au bout de téléphone, aucun ne connût Fabienne. Entre les policiers, se croisa le regard qui dit « bizarre » sans le dire.
Cette situation incompréhensible était plus grave pour Fabienne. Depuis son réveil, elle n’existait plus. Pour elle, être ou ne pas être telle était la question. Personne ne la crut ni ne l’écouta. Elle commença à sentir la peur : la peur de rien comprendre mais aussi celle d’être ignorée, d’être oubliée et d’être isolée de ce monde réel. Et cette peur l’étouffa petit à petit et fut transmise, d’une seconde à l’autre, en douleur qui venait de la sensation d’être incapable face à la situation. Elle entendit le policier qui affirma au téléphone de la transmettre à l’Hôpital dans une heure. De l’autre côté de bureau, elle vit un autre policier qui regarda sa déclaration sur laquelle elle pensa écrire sa date de naissance, son nom et son adresse. Ce policier commença à lire à sons collègue d’une voix discrète mais pas suffisamment de ne le faire entendre à Fabienne : « J’ai cent ans de douleurs, et aujourd’hui mes rêves n’ont plus de couleurs... ». Fabienne eut l’impression de recevoir un coup de choc. Le papier dans la main de ce policier fut bien ce qu’elle venait de lui rendre après y avoir rempli des informations de son identité. Elle oublia de respirer pendant quelques instants. Ce n’était plus le monde qu’elle ne comprenait pas. C’était elle-même qu’elle ne comprenait pas. Elle se sentit obliger d’éloigner de tout ce qu’elle avait connu : de se couper de l’extérieur était le seul moyen de se défendre, pour elle, contre tout ce qui se passa étrangement. Tout devint flou. Elle vit les gens qui s’approchèrent d’elle mais elle ne les regarda plus. Elle entendit des gens parler à elle mais elle ne les écouta plus. Elle ne fit plus d’effort de comprendre ou d’être comprise.

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